Il y a ce dicton en français : « Je peux lire en elle/lui comme dans un livre ouvert. » N’est-ce pas une manière très jolie d’exprimer ce désir que nous avons d’accéder à ce qui est à l’intérieur. A l’intérieur de ce que nous regardons et de son mystère.
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John Berger
Articles
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POSTCARD CHAT
1er janvier 2017 -
PARADE, L’ART ET LA POLITIQUE
12 avril 2018Le problème qui s’est posé là, au théâtre du Châtelet en 1917, est un des problèmes récurrents de l’art de notre temps. Nous sommes placés quotidiennement devant des questions qui mettent en jeu la vie de millions de personnes. La plupart d’entre nous évitent d’y penser sauf en cas de crise ou de guerre. Mais il y a chez les artistes, qui possèdent une imagination moins facile à brider que d’autres, des hommes qu’obsède le problème de savoir comment ils peuvent, à telle époque, justifier ce qu’ils font.
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UN PEINTRE DE NOTRE TEMPS
29 décembre 2021Si nous nions nos capacités, si nous en doutons, si nous nous les cachons ou si nous les exagérons, si nous les déguisons, bref si nous ne les acceptons pas, nous devenons des demi-hommes, sophistiqués, cyniques, des opportunistes. De tels sous-hommes abondent dans cette société, car c’est une société incapable de reconnaître ou d’utiliser les capacités de la grande majorité de ses citoyens. La reconnaissance des capacités de chacun devrait être un phénomène social externe ; c’est devenu une affaire personnelle et introspective.
John Berger, Un peintre de notre temps
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LA RÉUSSITE OU L’ÉCHEC DE PICASSO
26 avril 2015La réussite a été le destin de Picasso et elle l’a rendu caractéristique de notre époque comme Van Gogh l’avait été de la sienne.
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DIALOGUE AVEC SPINOZA
17 novembre 2016Aujourd’hui, ce qui caractérise la tyrannie, quel que soit le pays, c’est qu’elle est sans visage. Il n’y a ni Fürher, ni Staline, ni Cortés. Ses mécanismes varient selon les continents et l’histoire locale, mais son schéma général reste le même, un schéma circulaire.
Le fossé qui sépare pauvres et relativement riches devient abyssal. Les contraintes et les recommandations traditionnelles volent en éclats. Le consumérisme consume tout questionnement. Le passé devient obsolète. En conséquence, les gens perdent leur individualité, leur sens de l’identité, et donc cherchent et trouvent un ennemi de manière à se définir eux-mêmes. L’ennemi – quelle que soit son appartenance religieuse ou ethnique – on le trouve toujours parmi les pauvres. C’est là où le schéma circulaire est vicieux.
Le système économique produit, en même temps que de la richesse, de plus en plus de pauvreté, de plus en plus de familles sans logis, tandis qu’au même moment il promeut politiquement des idéologies qui articulent et justifient l’exclusion et l’élimination finale des hordes de pauvres.
Ce nouveau cercle politico-économique encourage aujourd’hui l’éternelle capacité humaine à la cruauté et fait disparaître l’imagination humaine. Lire la suite
John Berger, Le carnet de Bento
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UNE LETTRE POUR ROSA LUXEMBURG
22 juillet 2018Rosa ! Je te connais depuis que je suis gamin. Et maintenant, je suis deux fois plus âgé que tu l’étais quand ils t’ont battue à mort en janvier 1919, quelques semaines après que toi et Karl Liebnkecht avez fondé le Parti Communiste Allemand.
Etre un être humain, tu dis, est la chose la plus élevée de toutes. Et cela veut dire être ferme et clair et joyeux, oui, joyeux envers et contre tout, parce que se plaindre est affaire de faible. Etre un être humain veut dire secouer joyeusement sa vie entière dans la gigantesque échelle du destin s’il le faut, et en même tant se réjouir dans la clarté de chaque jour et la beauté de chaque nuage.
J’ai été, je suis, je serai, tu as dit. Ta vie est un exemple pour nous, Rosa.
John Berger, 2015. Lire le texte complet
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L’EXIL
25 juin 2018Si on ne saisit pas ce que le foyer a signifié à l’origine, on ne comprendra jamais pleinement le sens de l’émigration. L’émigration n’est pas uniquement le fait de quitter un pays, de traverser l’eau, de vivre parmi des étrangers, c’est aussi défaire le sens du monde.
A l’origine, le foyer représente le centre du monde, au sens existentiel... Sans un foyer au centre du réel, on ne sait pas où se réfugier, on est perdu dans le non-être et dans l’irréalité. Le foyer, c’est là où la ligne verticale croise l’horizontale. La ligne verticale monte au ciel et descend au pays des morts, sous la terre. La ligne horizontale représente la circulation terrestre, toutes les routes qui mènent à travers la terre à d’autres lieux... Le croisement des deux lignes, le réconfort promis par leur intersection sont des idées qui existaient probablement à l’état embryonnaire dans la pensée et dans les croyances des peuples nomades, mais ils emportaient avec eux la ligne verticale, tout comme les montants de leurs tentes. (…)
Après avoir quitté son foyer, l’émigrant ne trouvera plus jamais de nouvel endroit où se croisent les deux lignes de vie. La ligne verticale n’existe plus. Il n’y a plus de continuité entre lui et les morts ; maintenant les morts disparaissent tout simplement. Les dieux sont devenus inaccessibles. La ligne verticale s’est confondue avec le cercle du vécu individuel qui ne mène nulle part ailleurs qu’en soi-même.
John Berger, L’exil, 1985
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CONTRE L’IMMENSE DÉROUTE DU MONDE
16 novembre 2019Le premier pas dans l’édification d’un monde autre doit nécessairement être le refus de la vision du monde que l’on grave dans notre esprit et de toutes les vaines promesses utilisées partout pour justifier et idéaliser cette délinquance que représente le besoin insatiable de vendre. Un autre espace est un besoin vital.
D’abord il faut découvrir un horizon. Et pour cela, il nous faut retrouver l’espoir à l’encontre de ce que le nouvel ordre accomplit en prétendant faire l’inverse.
John Berger, La forme d’une poche, lire la suite
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LA CRISE DU SUJET
4 janvier 2019L’art est-il devenu abstrait parce que l’artiste est gêné par sa liberté ? Pouvant peindre n’importe quoi, serait-il devenu incapable de savoir quoi peindre ? Ses défenseurs parlent souvent de l’art abstrait comme d’un art de la liberté totale. Mais ne s’agirait-il pas de la liberté de l’île déserte ?
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VOIR LE VOIR
7 juillet 2015Un peuple ou une classe, coupés de leur passé, sont bien moins libres de choisir et d’agir en tant que peuple, ou classe, que d’autres qui ont eu la possibilité de se situer dans l’histoire.